Fini de rire
Georges Charbonnier n’a pas de notice dédiée sur la wikipedia au moment où j’écris cette note. Ses entretiens sont pourtant référencés dans les pages suivantes de l’encyclopédie, qui brossent de son travail un portrait en creux :
Ces notices wikipedia apparaissent sur la première page de résultats pour la recherche Georges Charbonnier. La page de Pierre Barbaud nous apprend qu’il était producteur d’émissions culturelles à la Radiodiffusion-télévision française. Google Images fourmille de photos des invités de ses entretiens, mais la sienne est introuvable.
J’ai découvert l’existence de Georges Charbonnier dans la transcription d’un entretien radiophonique de 1965 avec Jorge Luis Borges, publiée chez folio essais à la suite des Enquêtes de l’argentin. Charbonnier y apparaît en fidèle produit de son temps, pétri de structuralisme et de phénoménologie :
On a envie de dire que la critique moderne a épuisé le qualitatif qui précède l’introduction du qualitatif dans l’analyse des phénomènes.
Nous vivons donc une période de crise, ce qui ne signifie pas que l’analyse échoue, mais au contraire qu’elle réussit. Les remords, les regrets, les anathèmes, les palinodies, les nostalgies de toutes sortes si haut exprimées en sont le signe le plus sûr.
A l’inverse, Borges est lumineux :
Je pense que vous demandez trop à la littérature, vous êtes trop ambitieux ! (…) Je ne sais pas ce que vous avez écrit, ni quelles méthode vous avez voulue pour écrire. Je n’ai pas lu vos poèmes ni vos contes, je ne sais même pas s’ils existent. Je pense qu’ils doivent exister, puisque cette conversation que vous avez avec moi n’est pas une improvisation. Elle correspond à des choses que vous avez pensées, que vous pensez fort souvent, et surtout d’une façon essentielle, disons, d’une façon intense. Ce sont des choses qui vous ont troublé. (…) Ce sont des choses qui vous ont touché, et moi aussi, mais évidemment d’une façon moins lucide. C’est peut-être parce que je n’avais pas à résoudre ces problèmes. J’avais tout simplement à fabriquer des poésies et des contes. Alors j’ai moins pensé, parce que j’étais réduit à cette humble besogne, écrire. Écrire est peut-être un peu le contraire de penser.
On ne saurait rêver obtenir un meilleur contraste dans le plus noir des laboratoires de photographie. Georges Charbonnier n’est pas passé à la postérité pour ses poèmes ni pour ses contes, s’ils existent. Je pense moi aussi qu’ils existent, à l’ombre de ce que nous considérons aujourd’hui comme des grands livres (où chaque page est nécessaire, fatale ; nous les avons isolés de leur temps). Je suis à la recherche de ces poèmes et de ces contes oubliés pour trouver Georges Charbonnier et reconstruire une époque.
Merci de me communiquer toute information le concernant.